La dysfonction sexuelle chez le diabétique

La dysfonction sexuelle chez le diabétique 

Les causes neurologiques sont sans conteste l’un des facteurs principaux des dysfonctions sexuelles chez le diabétique. L'atteinte est souvent mixte, somatique et végétative, mais c'est vraisemblablement ce dernier aspect qui est prédominant dans le déterminisme des troubles.

La physiopathologie de la neuropathie autonome diabétique est complexe. L'influence de l'équilibre métabolique est suggérée par l'apparition d'une neuropathie précoce, le plus souvent avant celle des autres complications du diabète. Des facteurs immunologiques sont également incriminés dans le diabète de type1.

 

Les signes cliniques des dysfonctions sexuelles du diabétique

 

Chez la femme, l'interrogatoire peut retrouver la notion d'une baisse des sécrétions vaginales et/ou d'une hypo-, voire d'une anorgasmie.

Chez l'homme, Il s'agit en fait surtout d'une baisse des capacités sexuelles avec troubles de l'érection, qu'il s'agisse d'une altération en termes de durée et/ou de rigidité.

il peut s'agir d'une éjaculation rétrograde perçue par le patient ou décelée par la mise en évidence de spermatozoïdes à l'examen des premières urines émises après un rapport sexuel.

 

L'examen neurologique recherche une neuropathie somatique (polynévrite, multinévrite, atteinte plexique lombosacrée).

Une analyse soigneuse des vaisseaux (pouls périphériques, auscultation des trajets vasculaires) est indispensable.

La recherche de médications iatrogènes et de facteurs psychologiques intercurrents est fondamentale.

Des signes en faveur d'une insuffisance gonadique primitive ou secondaire ou d'une hyperprolactinémie doivent être éliminés.

 

Le bilan paraclinique

 

Une prise en charge multidisciplinaire est souvent nécessaire, incluant le concours de diabétologues, de psychologues, de sexologues et d'un laboratoire d'explorations fonctionnelles.

 

L'origine artérielle évoquée devant des signes cliniques d'artériopathie sera confirmée par la pratique d'un échodoppler, qui explorera la circulation aorto-iliaque et hypogastrique et mesure les vitesses circulatoires des artères caverneuses.

 

En réalité, la première étape devant une véritable impuissance consiste à réaliser une fenêtre thérapeutique vis-à-vis des médicaments suspects, en particulier des antihypertenseurs, des psychotropes, des fibrates, des anti-H2 et, évidemment, des antiandrogènes et des estrogènes.

 

L'arrêt de l'alcool en cas de surconsommation est bien évidemment indispensable.

 

Une anomalie hormonale peut être éliminée par les dosages plasmatiques de la testostérone, de l'estradiol, de la FSH, de la LH et de la prolactine.

 

La recherche d'une origine dysautonomique peut conduire à des explorations plus ou moins invasives. L'exploration urodynamique permet de mettre en évidence des anomalies en faveur d'une neurovessie périphérique (altération de la débitmétrie, hypoactivité détrusorienne en cystomanométrie). Les explorations neurophysiologiques périnéales peuvent compléter le bilan.

 

La mise en évidence d'une dénervation dans les muscles du plancher périnéal ainsi que d'une altération des latences sacrées, de la vitesse de conduction sensitive du nerf dorsal de la verge, voire des potentiels évoqués corticaux sont autant d'arguments pour une atteinte somatique. Mais, bien souvent, l'atteinte est végétative et la sensibilité des explorations électrophysiologiques est bien faible (potentiels évoqués cutanés sympathiques

 

La prise en charge

 

L'amélioration de l'équilibre glycémique est indispensable et permet parfois une régression des troubles.

 

Après cette étape, un traitement oral par drogues vasoactives peut être proposé. Les inhibiteurs de phosphodiestérase (sildénafil, tadalafil, vardénafil), par leur efficacité, leur facilité d'emploi et leur bonne tolérance, ont révolutionné le traitement symptomatique des dysfonctions érectiles. Leur action va empêcher la dégradation du GMPc et, partant, maintenir la mobilisation du calcium intracellulaire et la relaxation des fibres musculaires lisses. Ils doivent être pris, selon les molécules, entre 15 minutes et une heure avant l'acte sexuel. Leur durée d'action varie entre 3 et 15 heures et leur efficacité est soumise à l'existence d'une stimulation sexuelle.

 

Leur emploi impose le strict respect des contre-indications cardiaques (angor instable ou insuffisance cardiaque grave), ce qui peut poser

 

 

 

quelques problèmes avec le diabétique, chez lequel on connaît la fréquence de ce type d'altération et les facteurs de risque.

 

L'apomorphine est un agoniste dopaminergique qui stimule des noyaux de l'hypothalamus antérieur (aire médiane préoptique et noyau paraventriculaire). Partant, elle inhibe le centre orthosympathique (D10-L1) et stimule les centres sacrés responsables de l'érection réflexe.

 

Deux produits sont disponibles : lxense et Uprima avec, pour chacun, des formes à 2 et 3 mg. L'angor instable et l'insuffisance cardiaque restent des contre-indications.

 

Un traitement alphabloquant per os apporte souvent une aide.

 

Les injections intracaverneuses sont souvent utilisées en cas d'échec du traitement par voie orale. C'est l'injection de prostaglandine E1 (alprostadil, Edex, 10 et 20 µg/ml) qui est la plus utilisée. Elle exerce un effet de relaxation de la fibre musculaire lisse qui entoure les corps caverneux et permet un afflux de sang à leur niveau. Son efficacité dans les atteintes neurologiques varie de 70 % à 80o%.

 

Compte tenu du risque de priapisme, la posologie doit être prudente et progressivement croissante. Ce traitement vasoactif intracaverneux peut être proposé à titre de "starter" pour lever une angoisse d'échec, mais aussi être utilisé sur le moyen et le long terme. Son action est indépendante de l'excitation sexuelle.

 

La rééducation par un kinésithérapeute qualifié est parfois utilisée en cas d'hypotonie périnéale. Elle permet de retrouver un fonctionnement périnéal correct, notamment des bulbocaverneux. Elle utilise l'électrostimulation et le biofeedback.

 

La pose d'une prothèse pénienne (semi-rigide ou gonflable) reste exceptionnelle.  Elle ne se conçoit qu'après l'échec de toutes les autres formes de traitement, ce qui est rare, et lorsque la motivation du patient et de sa partenaire est suffisante.

 

En ce qui concerne l'anéjaculation ou l'éjaculation rétrograde, on peut essayer les sympathicomimétiques, notamment le chlorhydrate de minodrine (à dose croissante, de 5 à 15 mg) 2 heures avant un rapport sexuel, mais les résultats sont très aléatoires.

 

Dans tous les cas, l'aide d'un psychologue sensibilisé aux troubles sexuels est essentielle, afin de repérer un facteur psychogène et d'en préciser le mécanisme, sans omettre la pathologie du couple.

 

Chez la femme se plaignant de sécheresse vaginale et d'anorgasmie, l'application locale d'une crème estrogénique peut être proposée. La rééducation périnéale peut également être indiquée, ainsi qu'une prise en charge sexologique.

 

Conclusion

 

La prise en charge des troubles sexuels chez les diabétiques reste très délicate, sur les plans diagnostique et thérapeutique. Il faut insister sur la nécessité d'obtenir la motivation des patients pour un meilleur équilibre glycémique et s'appuyer sur la prise en charge sexologique du couple.